Après l’assaut, la difficile indemnisation à Dammartin et porte de Vincennes

Faute d’aide rapide de l’Etat, un appel aux dons a été lancé à Dammartin-en-Goële pour permettre de sauver l’imprimerie où ont été abattus les frères Kouachi.

Trois semaines après l’assaut, le calme est revenu à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne) et à la porte de Vincennes, à Paris. Le GIGN et le Raid sont repartis, mais des impacts de balles et des débris témoignent encore de leur passage. Ni l’imprimerie CTD ni l’Hyper Cacher n’ont encore rouvert leurs portes. Les locaux ont été dévastés et des travaux s’imposent. Qui les paiera ? C’est la question qui fâche, dans une pagaille administrative qui s’ajoute au traumatisme.

Que prévoient les textes ?

Les préjudices liés à l’activité des forces de l’ordre relèvent du ministère de la Justice, et plus précisément de son « bureau du statut et de la déontologie », selon le site du JDD. Pour que les indemnisations soient versées, le ministère doit toutefois disposer des procès-verbaux des enquêteurs, nécessaires pour identifier quels dommages ont été causés par le Raid ou le GIGN. Cela peut prendre des mois, car les PV sont couverts par le secret de l’instruction.

Et les assurances ? La loi du 9 septembre 1986 prévoit une couverture obligatoire des sinistres liés au terrorisme dans les contrats d’assurances habitation. Avec une précision : les dégradations doivent avoir été causées par les balles des terroristes et non par les forces de l’ordre. Or, à Dammartin comme à Paris, ce sont surtout les troupes d’élite qui ont tiré vers l’intérieur des bâtiments.

Comment les sinistrés font-ils face ?

En mars 2012, après l’intervention du Raid dans l’immeuble de Mohammed Merah à Toulouse, ses voisins ont découvert les dégâts de l’assaut. L’appartement de Florence, qui a servi de QG aux forces de l’ordre, a été inondé, après que les échanges de tirs ont fait exploser le radiateur du tueur. La résidente a présenté une facture de 1 200 euros à son assureur, qui a d’abord refusé de l’indemniser.

Réunis en collectif, les habitants ont obtenu, plus de quatre mois après l’assaut, un accord entre la Fédération française des sociétés d’assurances et le ministère de la Justice. Les assureurs se sont engagés à avancer les frais et à se faire rembourser par le gouvernement. « Certains ont reçu de l’argent très vite, raconte Florence à francetv info. Pour ma part, mon assurance n’a rien voulu entendre et cela ne s’est débloqué qu’en septembre 2013, grâce à mon avocat. Il a aussi fallu l’intervention d’un avocat, l’été dernier, pour faire réparer les fissures causées par les grenades. Nous nous sommes sentis seuls face aux assureurs, sans interlocuteur de l’Etat. »

A Dammartin-en-Goële, les salariés de l’imprimerie où s’étaient retranchés les frères Kouachi n’ont pas encore réintégré les locaux. Les ministères de Bercy se renvoient la patate chaude, rapporte le site de La Croix, et le ministère de la Justice, contacté par francetv info, reste silencieux sur la question de l’indemnisation. Même silence pour le dossier de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes.

Comment la solidarité s’organise-t-elle ?

Si les six machines de l’imprimerie CTD, hors d’usage depuis l’assaut, sont à l’arrêt, les factures et charges diverses continuent à tomber dans la boîte aux lettres de la société. Pour éviter une faillite et permettre une reprise rapide de l’activité, l’Union des commerçants de Dammartin a lancé une cagnotte en ligne, qui a déjà permis de collecter plus de 83 000 euros (soit le prix d’une machine), versés par plus de 2 000 participants. La région Île-de-France, comme d’autres collectivités locales, est entrée dans la ronde, jeudi, et a promis 50 000 euros d’aide.

Indignées par le mutisme de l’Etat, qui avait réagi en 24 heures dans le cas de Charlie Hebdo, plus de 25 000 personnes ont signé une pétition en ligneréclamant une aide pour CTD. Dans le cas de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à défaut de campagne publique de solidarité, un responsable de l’enseigne indique à francetv info que « des travaux sont en cours pour pouvoir rouvrir », sans vouloir en dire plus sur l’origine des fonds.

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