Après les attentats, l’épineuse question de l’indemnisation des victimes

Le dernier bilan des attentats, communiqué vendredi 20 novembre au soir par la ministre de la justice, fait état de 130 morts (les terroristes morts ne sont pas comptabilisés dans ce bilan). Des victimes représentant, pour vingt-cinq d’entre elles, vingt nationalités dont huit de l’Union européenne.

Ainsi, 599 personnes sont passées par les hôpitaux après les attentats et 195 ont nécessité une hospitalisation. Vendredi, 45 personnes étaient toujours en réanimation.

La cellule interministérielle mise en place par Manuel Valls pour accompagner les victimes et leurs familles devrait, dans une semaine, transmettre le flambeau au ministère de la justice, chargé de l’aide aux victimes de terrorisme. L’expérience des attentats de janvier a été mise à profit pour adapter le dispositif de crise, avec notamment un numéro de téléphone largement diffusé pour filtrer les appels (plus de 10 000 appels reçus en une semaine). Surtout, chaque famille de victime a un référent unique pour l’accompagner dans tous les domaines (information, accompagnement, démarches administratives).

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La priorité a été donnée à une identification rapide des victimes. L’institut médico-légal de Paris a ainsi reçu des équipes en renfort pour que ce travail soit terminé en moins d’une semaine, alors qu’il estimait que deux semaines seraient nécessaires. Les derniers permis d’inhumer devaient être délivrés par le parquet ce week-end. La cellule interministérielle est également en liaison avec les mairies de 29 communes pour faire établir les certificats de décès.

Pour ce qui concerne l’indemnisation, c’est le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI), créé en 1986, qui prend le relais. Les attentats du 13 novembre ayant eu lieu sur le territoire national, toutes les victimes (et leurs familles) sont concernées, quelle que soit leur nationalité.

« Parcours du combattant »

Vendredi, Michel Sapin a annoncé, lors d’une visite au siège du FGTI, à Vincennes, qu’une dizaine de personnes avaient reçu des premières avances. « Dès ce matin déjà, des premiers versements ont eu lieu, des premières provisions, sur les comptes des victimes ou des familles de victimes et de tous ceux qui ont besoin de cette solidarité », a déclaré le ministre des finances.

L’indemnisation dépendra de la nature des blessures, de l’existence ou non de séquelles. Le FGTI verse à la victime des indemnités provisionnelles, puis adresse une proposition d’indemnité. Si le FGTI prend contact directement avec les victimes ou avec leur famille, « il est indispensable de se faire épauler par des avocats spécialisés. En raison de l’état de choc, il est difficile d’évaluer toutes les conséquences à long terme de l’attentat », explique Stéphane Gicquel, à la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (Fenvac). Et celui-ci de noter « des écarts d’indemnisation importants entre une personne conseillée et une autre ».

« Obtenir une première aide est rapide, mais pour recevoir l’indemnisation définitive, cela peut virer au parcours du combattant. Son calcul peut être compliqué selon les préjudices subis. Il faut des expertises, contre-expertises, attendre que l’état de santé soit stabilisé… Pour les victimes, c’est une violence supplémentaire », indique Me Dominique Attias, chargée par le barreau de Paris de coordonner l’action des avocats au service des victimes et de leurs familles.

« Dans certains cas, la procédure peut être longue, admet Guillaume Clerc, directeur de la communication du FGTI, mais tant qu’une proposition d’indemnisation définitive n’est pas établie, nous continuons à verser des indemnités provisionnelles. » Si les victimes ou leurs ayants droit refusent l’offre d’indemnisation, ce sont les tribunaux qui déterminent le montant que le fonds devra régler.

 

Frédéric Cazenave , Journaliste au Monde

Jean-Baptiste Jacquin, Journaliste

 

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