Justice des mineurs: Taubira fixe le cap d’une réforme sans calendrier

La ministre de la Justice Christiane Taubira a fixé lundi à Paris le cap d’une réforme de la justice des mineurs, qui continue de privilégier les mesures éducatives mais qui n’apparaît pas dans le calendrier parlementaire.

La garde des Sceaux s’est exprimée devant un millier de professionnels du droit réunis à la Mutualité pour une journée de débats à l’occasion du 70e anniversaire de l’ordonnance de 1945, le texte de référence sur la justice des mineurs.

«Il faut rendre cette ordonnance plus cohérente, plus lisible, construire des réponses immédiates, rapides, plus adaptées et plus efficaces», a lancé Christiane Taubira. «C’est une réforme sur laquelle nous continuons à travailler et nous tirerons les enseignements des travaux menés aujourd’hui pour enrichir le texte», a-t-elle ajouté.

Manuel Valls avait promis que la réforme des mineurs serait discutée avant l’été 2015 mais la réforme n’apparaît pas pour l’instant dans le calendrier parlementaire.

«On avance sur notre projet, on travaille et, à moins qu’on nous fasse un croche-pied, on ira au bout», a assuré lundi à l’AFP l’entourage de la ministre.

Le ministère a mené courant décembre un round de concertation avec les syndicats de magistrats et les représentants des professions concernées à partir d’un document de travail ébauchant les grandes lignes de la future loi.

La nouvelle mouture qui reprend la philosophie générale de l’ordonnance de 1945 qui privilégie les mesures éducatives, propose notamment de généraliser le principe de la «césure du procès pénal»: une première audience d’examen sur la culpabilité est suivie d’une période de césure de six mois (prorogeable une fois) si le mineur est déclaré coupable, avant une seconde audience où sera prononcée la peine.

Autre mesure symbolique prévue, la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, créés en 2011 sous Nicolas Sarkozy.

«Mais les réponses ne sont pas exclusivement judiciaires», a fait valoir lundi Christiane Taubira pour qui «c’est la population jeune toute entière que nous devons comprendre, encadrer, éduquer».

«Les réponses doivent venir de la puissance publique toute entière, des professionnels et de la société civile», a-t-elle lancé en expliquant travailler avec plusieurs ministères dont l’Education nationale sur des sujets comme «le sentiment d’appartenance» à la société, «la conscience des droits et des devoirs» ou «la connaissance et le respect des règles».

«Chacun d’entre nous sait la charge émotive qu’il y a dans ce sujet et nous sommes nous-mêmes saisis de stupéfaction devant les actes, parfois graves, commis par des mineurs. Mais il demeure que nous refusons de révoquer la raison, c’est en tout cas la démarche que j’ai choisie», a expliqué la garde des Sceaux.

Quelque 234.000 enfants et adolescents ont eu à faire avec la justice en 2013, ce qui représente 3,6% des 6,5 millions de mineurs âgés de 10 à 17 ans, selon des statistiques du ministère de la Justice. 43% des infractions qui leur sont reprochées concernent des atteintes aux biens sans violence et 27% des atteintes aux personnes.

Parmi eux, 48.500 ont été condamnés par une juridiction de jugement. Les mesures prononcées se partagent à égalité entre les mesures éducatives (22.600) et les peines (22.700). L’incarcération demeure une mesure exceptionnelle: 734 mineurs étaient détenus au 1er janvier 2013 et 3.000 mineurs ont été incarcérés pendant l’année. Cinq ans après leur sortie, 75% d’entre eux ont à nouveau été condamnés.

AFP

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