La conformité de la garde à vue française au droit européen devant la Cour de Cassation

Article paru sur LeMonde.fr le 19 octobre 2010


La Cour de cassation se prononce mardi sur la conformité de la garde à vue française au droit européen, une décision qui pourrait bouleverser les procédures et obliger le gouvernement à revoir une nouvelle fois son projet de réforme. Lors d’une audience le 7 octobre, le parquet général avait recommandé à la chambre criminelle de la haute juridiction de déclarer non conformes aux règles européennes les dispositions régissant la présence de l’avocat en garde à vue.


Cette recommandation – que la cour n’est pas obligée de suivre – ne s’applique pas seulement à la garde à vue de droit commun, déjà en voie de réforme suite à une censure du Conseil constitutionnel le 30 juillet. Elle concerne également les régimes dérogatoires (stupéfiants, terrorisme, criminalité organisée), où la présence de l’avocat peut être retardée à la 48e ou 72e heure, et que le gouvernement n’a pas prévu de modifier car les Sages ne les ont pas remis en cause. De l’avis du parquet général, une personne gardée à vue ne doit pas être interrogée par les enquêteurs avant d’avoir rencontré son avocat sauf exception justifiée par des « raisons impérieuses ».


Le ministère public estime également que l’avocat doit pouvoir assister aux interrogatoires de son client dans les gardes à vue de droit commun, ce que prévoit la réforme, mais aussi à « l’ensemble des actes d’enquête auxquels participe activement le gardé à vue, notamment la confrontation et la reconstitution des faits ».

Si la Cour de cassation suit ces recommandations, le projet de loi du ministère de la justice, présenté mercredi 13 octobre en conseil des ministres, devra de nouveau être modifié pour renforcer les droits de la défense.


Mais une épée de Damoclès pèse aussi sur des milliers de procédures en cours : alors que le Conseil constitutionnel a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour mettre en œuvre la nouvelle loi sur la garde à vue, la décision de la Cour de cassation pourrait s’appliquer immédiatement. Pour éviter un changement trop soudain, le parquet général a suggéré que la mise en œuvre de certaines modifications soit exceptionnellement différée. Plus de 790 000 mesures de garde à vue ont été décidées en 2009, dont plus de 170 000 pour les seuls délits routiers.

source : LeMonde.fr
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