La surpopulation en prison n’enfreint pas nécessairement les droits humains

Dans un arrêt rendu jeudi 12 mars, qui précise sa jurisprudence en la matière, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) estime que le manque d’espace individuel en prison ne constitue pas systématiquement une violation des droits humains.

« S’il existe une forte présomption de traitement inhumain ou dégradant (…) lorsqu’un détenu dispose de moins de trois mètres carrés d’espace personnel », cela peut toutefois « être compensé par les aspects cumulés des conditions de détention, tels que la liberté de circulation et le caractère approprié » de l’établissement pénitentiaire, écrit la Cour.

Traitements dégradants

La CEDH avait été saisie à la fin de 2012 par un ancien détenu croate qui estimait que son manque d’espace personnel en prison — jusqu’à moins de trois mètres carrés pour certaines périodes courtes — violait l’article 3 de la Convention européenne des droits humains, qui interdit les traitements inhumains ou dégradants.

Mais la CEDH a rejeté sa requête au motif que ses conditions de détention n’avaient pas atteint « le seuil de gravité requis ». La Cour a notamment relevé que le requérant disposait d’un lit individuel et d’un point d’eau potable dans sa cellule, laquelle laissait passer la lumière naturelle et l’air extérieur. Elle a aussi souligné que le requérant était autorisé à circuler librement trois heures par jour dans sa prison, qui proposait par ailleurs diverses activités aux détenus.

Moins de 11 m2 par personne

En France, les détenus sont soumis à une loi datant de 1875, qui instaure l’encellulement individuel, principe qui ne signifie pas que chaque détenu a sa propre cellule, mais qu’un minimum de 11 m2 doit être assuré par détenu.

Cependant, cent quarante ans plus tard, cette mesure n’est toujours pas appliquée en raison de la surpopulation carcérale. En décembre 2014, les députés ont repoussé son application à 2019, voire à 2022.

En France, Pierre-Victor Tournier, démographe du champ pénal, directeur de recherches au Centre national de la recherche scientifique,  estime que la surpopulation carcérale atteint un total de 18,3 % de l’ensemble des détenus.

Une Europe pas exemplaire

Avec ce pourcentage, la France ne compte pas parmi les plus mauvais élèves de l’Europe, puisqu’un rapport du Conseil de l’Europe en mai 2013 révèle que la moitié des pays européens est également en situation de surpopulation carcérale. L’Hexagone se place en 11e position, après la Serbie, où 157,6 % des détenus sont en surpopulation carcérale, devant la Grèce et l’Italie, avec respectivement 151,7 % et 147 %.

Mais la France est l’un des pays où l’on enregistre le plus de suicides en prison, à la 4e place après le Benelux (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg), Malte et la Macédoine.

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