Obtenir le bac lorsqu’on est détenu, c’est la promesse d’un nouvel avenir. Mais aussi un rêve difficile à réaliser.
En 2014, 317 détenus ont ainsi tenté de décrocher le bac ou son équivalent, le Diplôme d’accès aux études universitaire (DAEU). Et 197 ont été reçus, sachant que beaucoup d’entre eux préparaient l’examen depuis plusieurs années.
« Une majorité des détenus présentent le DAEU qui est plus facile à préparer que le bac car il n’y a que quatre matières à réviser », explique Isabelle Bryon, responsable nationale de l’enseignement à la Direction de l’administration pénitentiaire. Les autres préparent des bacs pro, techno ou généraliste (le plus souvent de la série L).
Des candidats aux motivations diverses : « Certains le font pour meubler leurs journées de détention. Se projeter dans un parcours scolaire leur permet aussi de ne pas être réduit à leur condition de détenu et de s’inscrire dans une perspective valorisante. D’autres sont davantage animés par une volonté de réinsertion », décrit Mathilde Robert, présidente de Genepi, une association estudiante qui œuvre pour la formation des détenus.
Peu de cours en face-à-face
Reste que se lancer à la conquête d’un diplôme tient du parcours du combattant lorsque l’on vit en prison. Pour le préparer, les détenus suivent généralement des cours à distance. Des enseignants de l’Education nationale leur dispensent aussi quelques heures de cours par semaine, mais dans certaines matières seulement, faute de moyens.
Les candidats peuvent aussi compter sur l’aide de plusieurs associations, telle qu’Auxilia qui propose aux détenus un accompagnement à distance dans certaines matières ou Genepi, dont les étudiants bénévoles viennent les rencontrer en prison pour leur apporter un soutien scolaire.
Un projet qui s’inscrit dans le temps
Les détenus n’ont pas non plus les mêmes chances de réussir, selon leur lieu d’incarcération. « Pour les détenus de maison d’arrêt qui partagent leur cellule avec d’autres, il est très difficile de préparer un examen. C’est plus envisageable pour ceux qui purgent une plus longue peine dans un centre de détention et disposent d’un encellulement individuel », explique Mathilde Robert. Seule exception : la maison d’arrêt de Fleury-Merogis qui propose un vrai accompagnement aux candidats, grâce à ces 4 centres scolaires : « Les détenus ont au moins trois heures de cours par jour et peuvent réviser dans nos centres », explique Matthieu Raynaud le proviseur adjoint, qui annonce une trentaine de candidats au bac pour cette année. Difficile aussi de travailler sans accès à Internet et avec une bibliothèque pas toujours bien fournie.
Des multiples embûches qui expliquent les abandons en cours de route. « Certains connaissent des pics de découragement ou laissent tomber ce projet, car ils obtiennent un aménagement de peine et sortent de prison », explique Isabelle Bryon.
Un diplôme qui ouvre des perspectives
Pour les plus opiniâtres, la patience est de mise, explique Nicolas Dhelft, porte-paroles d’Auxilia : « il faut au moins deux ans pour préparer un diplôme et parfois même beaucoup plus ». Et pas question d’espérer une éventuelle clémence du jury car pour le bac, les correcteurs ne connaissent pas l’origine des copies. « Le jury se déplace uniquement pour les oraux », précise Isabelle Bryon.
Mais s’accrocher à ses études est souvent payant. « Avoir son bac, c’est faire un premier pas vers la réinsertion », affirme Isabelle Bryon. « Cela donne aussi une autre image d’eux à ceux qui avaient jusqu’à là, connus un parcours chaotique », renchérit Matthieu Raynaud. Pour valoriser les efforts des détenus, l’administration pénitentiaire organise d’ailleurs une remise solennelle des diplômes. « Obtenir un diplôme en prison, c’est avoir fait la preuve de son bon comportement, ce qui capital pour obtenir une remise de peine », ajoute aussi Mathilde Robert.