Grâce à la lecture, l’association « Lire pour en sortir », avec le soutien du Secours Catholique-Caritas France, favorise la réinsertion et la sortie anticipée des détenus. Leur partenariat sera officialisé lors de la signature d’une convention nationale mercredi 23 septembre, au siège du Secours Catholique. Cette journée sera également l’occasion de revenir sur les expérimentations en cours.
- « La prison est un lieu où les mots, les mots des autres, sont devenus vitaux », témoigne Christophe de La Condamine, ex-détenu pour braquage, dans son livre Journal de taule. « J’ai fait mes six ans (de détention, ndlr) en réussissant à ne prendre aucun cachet, grâce aux livres, je crois. (…) C’est fou ce que l’on a besoin de s’intéresser à tout pour pallier l’absence de liberté. »
Effort d’insertion
La lecture, c’est ce sur quoi Alexandre Duval-Stalla et son association « Lire pour en sortir », créée en juin 2014, misent pour favoriser la réinsertion des personnes incarcérées.
« Le parcours d’un délinquant peut s’expliquer, entre autres, par une fracture éducative. Il a souvent rencontré des difficultés dans son parcours scolaire. La lecture et l’écriture étant deux composantes essentielles de l’insertion sociale, nous pensons que notre programme de lecture contribuera à la réinsertion des détenus dans la société à leur sortie de prison », déclare cet avocat au barreau de Paris, également écrivain et bénévole pour le département Prison-justice du Secours Catholique.
Et Alexandre Duval-Stalla peut déjà se féliciter d’un succès. À force de conviction, il est parvenu à faire adopter en juin 2014 un amendement au projet de loi sur la réforme pénale, entrée en vigueur en octobre dernier, qui accorde des réductions de peines supplémentaires « aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment (…) en s’investissant dans l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul, ou en participant à des activités culturelles, et notamment de lecture, etc. ».
Ainsi « Lire pour en sortir » propose un programme de lecture aux personnes condamnées, qui peut les faire bénéficier de réductions de peines supplémentaires allant jusqu’à deux mois par année.
Choisir de lire
- Le concept est simple. Une fois inscrit, le détenu peut choisir plusieurs livres dans des sélections qui lui sont présentées. Si un ouvrage lui tient vraiment à cœur, il peut être intégré à la sélection. Un bénévole du Secours Catholique lui apporte alors les livres et l’accompagne dans sa lecture. Il l’aide à établir une fiche de lecture et l’envoie à « Lire pour en sortir » qui la transmettra à son tour au Service d’insertion et probation (Spip) de la maison d’arrêt ou du centre de détention où est écroué le détenu, ainsi qu’au juge de l’application des peines.
Ce dernier, à partir de cette fiche de lecture et d’un rapport du bénévole sur l’attitude du détenu lors du programme de lecture, évaluera l’effort fourni par le détenu et lui accordera ou non une réduction de peine de la durée qui lui semblera la plus adaptée.
À la maison d’arrêt de Châlons-en-Champagne, l’expérience est sur le point de voir le jour. « Nous sommes actuellement dans une phase de mise en place et d’inscription des détenus au programme », explique Gaëlle Collin, la directrice pénitentiaire d’Insertion et probation.
« Ils sont très intéressés par cette initiative. Plus qu’une réduction de peine, c’est l’occasion pour eux d’acquérir des savoirs de base et de développer un lien social à travers l’accompagnement du bénévole. Ils réalisent un effort d’insertion. »
Au-delà du livre
- « En partageant avec nos bénévoles sur leur lecture, cela dépassera forcément le sujet du livre et favorisera le développement d’échanges que les détenus n’ont pas forcément aujourd’hui », s’enthousiasme Michaël Boude, délégué du Secours Catholique de Châlons/Reims-Ardennes. « Nous veillerons à ce que les personnes les plus éloignées de la lecture puissent accéder au programme afin qu’il ne tourne pas à l’élitisme », précise Jean Caël, responsable du département Prison-justice du Secours Catholique.
Après la signature prochaine de la convention nationale entre les deux partenaires, l’initiative sera étendue à d’autres lieux de détention tels que ceux de Mont-de-Marsan, Longuenesse, Fresnes, Albi et Nice.
Clémence Véran-Richard