Une circulaire, attendue en 2015, devrait préciser les contours de la justice restaurative, entrée dans le code de procédure pénale cet été. En attendant, quelques groupes de parole se mettent déjà en place.
« Des questions très crues, hyper violentes sont posées […] Certains ont failli arrêter […] C’est quand même éprouvant ». C’est de justice restaurative dont parle François Goetz, directeur de la maison centrale de Poissy. Précurseur en la matière, ce fonctionnaire a participé, en 2010, à la mise en place dans cet établissement de groupes de parole entre auteurs et victimes d’infractions. « Convaincu de l’efficacité de cet outil », François Goetz explique que les ressentis des auteurs et des victimes se ressemblent beaucoup. « Ils parlent de libération, de soulagement », témoigne-t-il.
En général, les victimes disent « qu’elles recommencent à vivre », suite à cela. Les infractions en question étaient particulièrement graves (viols, assassinat, etc.). Pour le moment, six auteurs et six victimes ont été concernés par cette expérimentation à la maison centrale de Poissy. « Une goutte d’eau dans la mer », admet le directeur d’établissement pénitentiaire. Selon lui, le principal obstacle au développement en France de ces mesures est « culturel ». Certains y voient une forme d’acharnement sur les victimes, affirme-t-il.
« Dans les starting-blocks »
Ainsi, les mesures de justice restaurative sont rares en France, mais les choses pourraient changer puisque la réforme pénale (L. n° 2014-896, 15 août 2014) a fait entrer ce nouvel outil dans le code de procédure pénale (CPP, art. 10-1). François Goetz indique qu’une circulaire en la matière a été annoncée pour 2015. Et du côté des professionnels, l’attente semble importante. « Certains sont dans les starting-blocks, beaucoup attendent de l’information, de la formation », explique Frédéric Lauféron, président de l’Association de politique criminelle appliquée et de réinsertion sociale (APCARS). Cette dernière s’est dotée en juin d’un service régional dédié à la justice restaurative et se prépare à lancer ses premières rencontres entre auteurs et victimes d’infractions en Ile-de-France.
Dans ce cadre, des rencontres entre groupe de victimes et groupe d’auteurs de violences volontaires commenceront au premier trimestre 2015. Il s’agira de rencontres indirectes, ainsi les auteurs et victimes ne se connaîtront pas. Elles se dérouleront en milieu ouvert avec des probationnaires suivis par le service pénitentiaire d’insertion et de probation du Val d’Oise et des personnes victimes accompagnées par l’APCARS. Deux co-animateurs et deux représentants de la société civile y participeront également. En tout, 6 rencontres seront programmées. Pour l’heure, l’association les prépare. « Le temps de préparation avec les personnes est le plus important », souligne Noémie Micoulet, juriste de l’association. D’autres projets de l’APCARS seront mis en place prochainement. Comme des rencontres entre auteurs et victimes d’accidents de la circulation, à partir de juin 2015. L’association envisage également de développer des rencontres directes entre l’auteur et la victime d’une même infraction en présence d’un tiers médiateur.